
Ma mère me dit souvent : «Ma fille, tu sais jamais à quel point le plus petit de tes gestes peut avoir un impact chez les autres.»
Cette année-là, j’étais en convalescence. Je désirais lire et il m’était difficile de me déplacer pour me rendre dans les bibliothèques.
Le service Biblio-courrier, un service de prêt à domicile, était apparu dans les résultats de mes recherches sur Internet.
J’ai téléphoné :
- Désolée, madame, ça s’adresse aux personnes aînées ou handicapées.
Même si j’expliquais ma situation sur toutes les coutures, elle ne cadrait pas dans les critères établis pour bénéficier de ce service. Puis, j’eus soudain une idée ! Je dis :
- Je trouve une vieille personne, quitte à la ramasser dans la rue, pis je vous rappelle tantôt.
Dix minutes plus tard, j’avais trouvé une vielle dame, ma voisine.

Le temps de la convaincre, je téléphonais de nouveau, victorieuse, et passai le combiné à ma précieuse aînée qui répondit de bonne grâce aux questions d’usage, même si ce service ne l’intéressait pas. Puis, contre toute-attente, la technicienne en documentation demanda à me parler. Ma vieille dame me tendit le combiné.
- Nous allons faire une exception, on vous inscrit et on livrera les livres chez vous, mais uniquement pour la durée de votre convalescence. Ensuite, on résilie votre abonnement.
Oh !
À moi le décollage !
Pendant que le givre s’emparait de mes fenêtres et que le vent hivernal sifflait derrière ma porte enneigée, je voyageais partout dans le monde grâce aux livres.

Je me souviens d’être allée en Tunisie faire la connaissance d’une enseignante dévouée peinant sous ce climat chaud. Je me suis promenée en Amérique du Sud, dans les plantations de coton. J’ai traversé l’Atlantique à bord de bateaux d’esclaves dans lesquels j’ai souffert, moi aussi, de vomissements et de meurtrissures provoquées par les chaînes, indisposée par l’odeur fétide des corps malades. Je suis allée en Angleterre où j’ai eu peur des rois cruels qui faisaient régner la terreur dans les villages. Je me suis retrouvée à l’époque de la Nouvelle-France à danser et à rire dans les chaumières au son du violon, humant l’odeur de bois dégagée par les poêles, puis je me suis insérée dans le monde moderne et j’ai marché dans les rues entre les tours de verre à New-York.
J’attendais toujours le facteur avec impatience. Je recevais chaque fois les livres comme des cadeaux que je retirais précautionneusement de la poche en tissu rugueux. Oh ! les belles couvertures si lisses entre mes mains. Oh ! les beaux titres. Ah ! l’odeur du papier. Et j’avais toujours une pensée de gratitude pour l’équipe qui travaillait dans l’ombre. Je me demandais parfois qui ils étaient.
Un jour, il fallait bien que ça arrive, la lettre résiliant mon abonnement est arrivée.
En même temps, ma convalescence tirait à sa fin. Il était temps pour moi de replonger dans le tourbillon de la vie.
- Tu vois, maman, cette dame chez Biblio-Courrier ne se doutait probablement pas des répercussions positives de son geste dans ma vie.
- Hum… Il y a des gens qui sèment beaucoup de bonheur et qui ne le savent pas.
Service de Biblio-courrier pour les personnes âgées ou handicapées :
Très belle belle histoire, et en plus, tu me fais découvrir un service pour les personnes âgées que je côtoie…c’est un 2 pour 1 ! Ce serait bien que ce service soit accessible aux convalescents à domicile vivant seuls…tu es la preuve vivante qu’il correspond à un besoin…
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Biblio-courrier ne couvre pas tout le territoire, il faut s’informer.
Eh oui, bien d’accord, il y a place pour un tel service s’adressant aux convalescents.
Merci, Marlène, de ton commentaire 🙂
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Bravo Clémence pour ce texte touchant. Et merci de nous rappeler que même les gestes simples peuvent faire une belle différence.
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C’est un plaisir ! Merci d’avoir pris une minute pour commenter 🙂
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Chère Clémence, j’aime beaucoup lire tes belles histoires, qui me touchent vraiment ! Les petits gestes anodins qui n’en sont pas.
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C’est vrai qu’en bout de ligne, ces gestes valent leur pesant d’or. Merci d’avoir pris quelques minutes pour écrire ce commentaire 🙂
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Entierement d’accord avec toi Clémence..un p’tit geste amène une ouverture sur les gens, le premier pas.
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Très juste. Et ce qui me fascine, ce sont les gestes qui résonnent chez les autres sans qu’on sans doute le moins du monde comme ne sans doute probablement pas l’équipe dans cette histoire.
Merci, Arnold 🙂 C’est apprécié que tu aies pris le temps de commenter
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Bravo Clémence; très intéressant..J’ai déjà hâte au prochain numéro. x.x.x
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Bonjour, Yvette. Merci d’avoir pris la peine de commenter. J’essaie de me ménager du temps pour écrire 🙂 C’est le fun d’avoir des lecteurs et lectrices qui lisent 🙂
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